La Bibliothèque italienne : les Italiens parlent aux francophones (de littérature !)

Dans le pay­sage des sites dédiés à la lit­té­ra­ture, vient d’apparaître La Bibliothèque ita­lienne (« Observatoire de la lit­té­ra­ture ita­lienne »), qui s’est don­né pour mis­sion de faire par­ler des Italiens de la lit­té­ra­ture de leur pays, grâce à des chro­niques rédi­gées direc­te­ment en fran­çais, à des­ti­na­tion de lec­teurs fran­co­phones. Comme Scripteo apporte sa petite pierre à l’édifice, en cor­ri­geant les textes, on a pen­sé vous pré­sen­ter un peu plus en détail ce beau projet.


Un pont entre la France et l’Italie

C’est Gessica Franco-Carlevero, écri­vaine ita­lienne, ensei­gnant par ailleurs l’italien à Marseille où elle habite, qui est à l’origine du pro­jet. Expliquant que sa situa­tion d’expatriée l’avait un temps fait se sen­tir étran­gère à la fois en France et en Italie, et que consé­cu­ti­ve­ment s’était posée la ques­tion de la per­ti­nence de conti­nuer à tra­vailler sur la lit­té­ra­ture ita­lienne alors qu’elle vivait en France, elle dit avoir ima­gi­né avec le site de La Bibliothèque ita­lienne le moyen de dres­ser un pont sym­bo­lique entre l’Italie, son pays d’origine, et la France, son pays de rési­dence. Étant elle-même auteure, Gessica pré­fère ne pas cri­ti­quer les œuvres d’autres auteurs. C’est donc un col­lec­tif de rédac­teurs qui s’y attèlent (Mari Accardi, Antonino Bondì, Valentina Maini, Laura Paoletti, Ombretta Brondino, Miranda Martino, Stefania Meneghella.) Dans un style propre à cha­cun, pro­fes­seurs, ama­teurs éclai­rés et écri­vants nous livrent des chro­niques avi­sées sur leurs décou­vertes lit­té­raires ou les évé­ne­ments aux­quels ils ont assis­té. Par ailleurs, des tra­duc­trices, Marta Somazzi et Catherine Guelton, tra­duisent les extraits de textes d’auteurs non encore tra­duits en fran­çais. Enfin, des illus­tra­teurs (Mari Accardi, Filomena Oppido, Pia Taccone, Davide Arminio) four­nissent de très beaux des­sins pour les articles consa­crés à des por­traits d’écrivains.

À la découverte du paysage littéraire italien

Le site pro­pose de don­ner, petit à petit, comme une biblio­thèque qu’on rem­pli­rait au fur et à mesure d’articles, une vision du pano­ra­ma édi­to­rial ita­lien. On y lit donc des chro­niques de livres et de revues qui font la lit­té­ra­ture contem­po­raine ita­lienne, mais y sont éga­le­ment pré­sen­tés des évé­ne­ments lit­té­raires tels que des fes­ti­vals, des salons, des ren­contres, ou encore des lieux tels que des librai­ries. Par ailleurs, des entre­tiens avec des écri­vains, des édi­teurs ou des tra­duc­teurs per­mettent aux lec­teurs d’en apprendre davan­tage sur les secrets de fabri­ca­tion des livres et revues. Enfin, des enre­gis­tre­ments audio lus par des acteurs (Filomena Oppido, Valentina Iuvara, Ariela Stingi, Monica Carelli, Gianni De Berardinis) per­mettent d’écouter des textes lit­té­raires en ita­lien, afin de per­ce­voir « le son authen­tique de la langue, mais aus­si la musi­ca­li­té propre à chaque auteur ». Des res­sources qui devraient inté­res­ser non seule­ment les ama­teurs de lit­té­ra­ture ita­lienne, mais aus­si les ensei­gnants et les étudiants.

Le début de Sostiene Pereira d'Antonio Tabucchi lu par Valentina Iuvara.

Le début de Sostiene Pereira d’Antonio Tabucchi lu par Valentina Iuvara.


Rendre compte de la bibliodiversité italienne

Parallèlement à ce ver­sant jour­na­lis­tique et cri­tique, La Bibliothèque ita­lienne s’est don­né une autre mis­sion, celle de faire la pro­mo­tion de jeunes auteurs publiés en Italie qui pour­raient sus­ci­ter l’intérêt d’un lec­to­rat ita­lia­no­phone ou de pro­fes­sion­nels fran­co­phones de la lit­té­ra­ture ita­lienne (agents, édi­teurs). Les livres dont il est ain­si fait la pro­mo­tion sont signa­lés par la men­tion « conte­nu pro­mo­tion­nel » et publiés sous les onglets « À décou­vrir » et « En Avant » (cor­res­pon­dant cha­cun à une visi­bi­li­té dif­fé­rente). En effet, par­tant du constat qu’on lit de la lit­té­ra­ture ita­lienne en France, mais qu’on ne connaît pas la biblio­di­ver­si­té qui carac­té­rise l’Italie, Gessica Franco-Carlevero sou­haite don­ner plus de visi­bi­li­té aux auteurs mécon­nus. Cette pro­blé­ma­tique de la trans­mis­sion s’articule donc ici avec celle de la recherche d’un modèle éco­no­mique, et cette ten­ta­tive est assu­mée comme telle par la direc­trice de rédaction.


Écrire dans une langue étrangère

L’aide appor­tée par Scripteo dans ce beau pro­jet consiste à cor­ri­ger les textes écrits en fran­çais par les rédac­teurs ita­liens. Leur démarche est belle et cer­taines créa­tions lin­guis­tiques liées à leur pra­tique du bilin­guisme méri­te­raient d’être conser­vées. Mais d’un com­mun accord avec la direc­trice de rédac­tion, on a choi­si de pri­vi­lé­gier la flui­di­té de la lec­ture et donc de réécrire les rares pas­sages qui le néces­sitent. Quand on l’in­ter­roge sur son rap­port à l’écriture dans une langue étran­gère, Gessica Franco-Carlevero explique que c’est comme uti­li­ser des mots qu’on emprun­te­rait à d’autres. La démarche implique d’être plus franche, plus direct et plus sin­cère, à cause de la néces­si­té de trou­ver le bon mot pour être bien com­pris. Pour illus­trer son pro­pos, elle explique : écri­vant actuel­le­ment dans sa langue mater­nelle un roman sur la tris­tesse conju­gale, elle peut jouer avec la langue, évo­quer une situa­tion sans par­ler ouver­te­ment de tris­tesse. Et de conclure : « il y a moins d’humanité à écrire dans une langue étran­gère. » On ajou­te­ra pour notre part — plus pro­saï­que­ment — que la cor­rec­tion et la réécri­ture consistent alors peut-être à ajou­ter un peu d’huile dans les rouages.


Un observatoire « dynamique et en évolution »

Vous l’aurez com­pris, on vous recom­mande cha­leu­reu­se­ment la fré­quen­ta­tion de La Bibliothèque ita­lienne. Ses rédac­teurs sont des pas­seurs qui ont à cœur de trans­mettre leurs connais­sances poé­tiques aux lec­teurs fran­co­phones. Qui plus est avec une approche hori­zon­tale, puisque les auteurs connus côtoient des auteurs débu­tants, et que des tra­duc­teurs expé­ri­men­tés sont pré­sen­tés à côté de jeunes édi­teurs. Un pro­jet à suivre, car il pour­rait évo­luer dans le futur, puisque Gessica Franco-Carlevero sou­hai­te­rait ouvrir une Maison de l’écriture pour en faire un lieu d’accueil d’écrivains, et de ren­contres avec le public. Affaire à suivre, donc !

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